Les défenseurs interpellent le gouvernement fédéral de tenir sa promesse en matière d’assurance médicaments
La Loi concernant l’assurance médicaments est entrée en vigueur le 10 octobre et, à ce jour, seules trois provinces et un territoire ont signé des accords avec le gouvernement fédéral pour la prise en charge gratuite des médicaments pour le diabète et les contraceptifs. Les neuf autres gouvernements n’ont pas signé. Une nouvelle parue la semaine dernière expliquent pourquoi. Ils veulent plus d’argent.
Le ministre de la Santé du Nouveau-Brunswick, John Dornan, a déclaré au Coop Média NB : « Le programme d’assurance-médicaments au Nouveau-Brunswick nous aurait coûté beaucoup d’argent, plus que ce dont nous disposons. L’offre fédérale était bien inférieure à ce que cela nous aurait coûté ».
Dornan n’a pas donné plus de détails sur l’offre proposée, mais une analyse récente réalisée par Canadian Centre for Policy Alternatives a estimé le budget consacré à l’assurance-médicaments au Nouveau-Brunswick à environ 136 millions de dollars.
Dornan a ajouté : « Entre l’assurance, les cartes de médicaments délivrées par le ministère du Développement social et un bon régime provincial d’assurance-médicaments avec des primes peu élevées pour les personnes à faible revenu, les Néo-Brunswickois sont relativement bien couverts. Nous avons demandé au ministre fédéral de réexaminer son offre, et nous continuons d’espérer ».
En réponse aux commentaires de Dornan, Steven Staples, directeur national des politiques et du plaidoyer de la Coalition canadienne de la santé, a déclaré : « Si les habitants du Nouveau-Brunswick bénéficient d’une bonne couverture, pourquoi les libéraux ont-ils promis la gratuité des contraceptifs ? Nous savons qu’un Canadien sur quatre a du mal à payer ses médicaments, et ce phénomène est plus fréquent chez les personnes situées au bas de l’échelle socio-économique ».
Un sondage réalisé en 2024 par la firme Environics à la demande de la Coalition canadienne de la santé brosse un tableau pénible de l’accès aux médicaments au Nouveau Brunswick. Parmi les Néo-Brunswickois interrogés :
• 56 % ont déclaré que le fait de ne pas pouvoir se permettre d’acheter des médicaments sur ordonnance ou des appareils médicaux était une préoccupation majeure.
• 24 % ont déclaré ne pas renouveler leur ordonnance ou faire durer leurs médicaments plus longtemps (par exemple, en sautant des doses ou en coupant les comprimés en deux) en raison de leur coût.
• 27 % ont déclaré hésiter à quitter leur emploi ou à changer de travail par crainte de perdre leur couverture privée pour les médicaments sur ordonnance.
• 21 % ont déclaré qu’eux-mêmes, ou un membre de leur famille souffrant du diabéte de leur foyer bénéficieraient personnellement d’un régime d’assurance-médicaments.
Les habitants du Nouveau-Brunswick, avec ceux de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, sont les plus susceptibles de sauter des doses ou d’essayer de prolonger la prise de leurs médicaments en coupant les comprimés en deux en raison des coûts, selon une enquête réalisée avant l’adoption de la loi sur l’assurance-médicaments en 2024.
Les coûts pour les patients diabétiques à faible revenu peuvent atteindre des centaines de dollars par mois.
Le Manitoba, la Colombie-Britannique, l’Île-du-Prince-Édouard et le Yukon ont signé des accords avec le gouvernement fédéral en matière d’assurance-médicaments, mais les autres provinces et territoires ne l’ont pas fait. Cet écart crée une couverture disparate à travers le pays. Par exemple, un résident de l’Île-du-Prince-Édouard bénéficie d’une couverture publique pour ses médicaments contre le diabète, mais perd cet avantage s’il déménage dans la province voisine du Nouveau-Brunswick, ou en Ontario ou en Alberta.
Le gouvernement du Québec, et le Bloc Québécois, s’opposent au programme fédéral d’assurance-médicaments, affirmant que la couverture offerte par les employeurs et le gouvernement québécois suffisent à la tâche. Mais les groupes de la société civile et les syndicats québécois se battent depuis plus de dix ans pour obtenir une assurance-médicaments universelle.
L’Ontario n’a pas signé d’accord avec Ottawa et affirme qu’il doit « en savoir davantage » avant de s’engager.
Selon la CBC la Nouvelle Écosse veut retourner à la table de négociation. Dans un reportage de la CBC la ministre de la Santé de Terre-Neuve-et-Labrador Krista Lynn Howell a déclaré « Nous savons que l’assurance-médicaments est une mesure qui bénéficiera à tous les citoyens de ce pays. Terre-Neuve-et-Labrador ne sera pas oubliée ».
Yvonne Earle, militante du Conseil des Canadiens à Terre-Neuve-et-Labrador, est d’avis que « L’une des choses dont les Canadiens sont fiers est leur système de santé… [et] notre système de santé est actuellement soumis à une pression considérable… Et l’un des moyens d’améliorer la situation consiste à offrir une assurance-médicaments à tous les Canadiens ».
Steve Staples a souligné dans une entrevue avec CTV Regina que la Saskatchewan pourrait bénéficier de $2 millions pour l’assurance médicaments.
Ne rompez pas la promesse d’assurance médicaments, disent les défenseurs partout au Canada
La ministre canadienne de la Santé, Marjorie Michel, était au Nouveau-Brunswick la semaine dernière, alors que la Coalition canadienne de la santé, la Coalition ontarienne de la santé et la Fédération du travail de l’Ontario et leurs alliés étaient à Huntsville en marge de la rencontre biannuelle du Conseil de la fédération des premiers ministres pour leur rappeler de protéger les soins de santé publics.
Quand les journalistes ont posé des questions aux sujets de l’assurance-médicaments la ministre s’est fait vague.
Elle ne s’est pas engagée à signer de nouveaux accords sur l’assurance-médicaments et selon le Telegraph-Journal « L’argent destiné à l’assurance-médicaments pourrait disparaître ».
De plus la nouvelle que le nouveau gouvernement de Mark Carney va sabrer dans le budget de Santé Canada et éliminer jusqu’à 2,000 emplois ajoute aux inquiétudes des défenseurs de l’assurance-médicaments, qui affirment que le programme national universel d’assurance-médicaments a besoin de plus d’argent, et non moins.
Selon Steve Staples de la Coalition canadienne de la santé, cité dans iPolitics : « Je pense que cela envoie un très mauvais signal aux provinces et territoires qui envisageaient de se joindre au programme. La loi n’a été adoptée qu’en octobre, et nous avons conclu quatre accords avant le déclenchement des élections, et d’autres provinces sont en attente ».
La chercheuse principale au Congrès du travail du Canada, Elizabeth Kwan, qui œuvre depuis longtemps sur l’importance de l’assurance-médicaments, a déclaré lundi lors d’une interview avec la Presse canadienne que de nombreuses personnes dépendent de la couverture des médicaments offerte par leur régime d’assurance au travail. Étant donné les licenciements et les pertes d’emploi dans les secteurs touchés par les droits de douane, comme les industries manufacturières, « c’est pourquoi nous avons besoin d’un système public universel ».
L’assurance médicaments changent les vies
Alors que la Colombie-Britannique a signé un accord avec le gouvernement fédéral sur l’assurance-médicaments, AccessBC, un groupe de défense des droits qui promeut la contraception gratuite sur ordonnance, a organisé une campagne intitulée « L’assurance-médicaments ne devrait pas dépendre de votre code postal ». Cette campagne d’envoi de lettres aux élus. Selon eux, des centaines de milliers de personnes ont pu accéder à la contraception sur ordonnance en Colombie-Britannique depuis que la province a rendu la contraception gratuite en 2023.
« Cela prouve non seulement que le coût est un obstacle important qui empêche les gens d’accéder aux formes de contraception les plus fiables, mais cela montre également que lorsque le coût de la contraception sur ordonnance est supprimé, l’impact sur la capacité des gens à y accéder est immédiat et significatif », selon AccessBC.
Dru Oja Jay, directeur général du Conseil des Canadiens, affirme : « Plutôt que de mettre le régime d’assurance-médicaments en veilleuse pour financer l’achat de chasseurs F-35 hors de prix ou le ridicule Dôme doré de Trump, nous devrions saisir cette occasion pour élargir le régime d’assurance-médicaments et aider des millions de Canadiens qui ont du mal à accéder à des soins vitaux ».
Mike Bleskie, atteint de diabète de type 1, qui a témoigné devant le Comité permanent de la santé déclare : « Un régime d’assurance-médicaments universel, à payeur unique et financé par l’État changera la vie de millions de Canadiens, en particulier ceux qui souffrent de maladies chroniques comme le diabète ».


